Dans l’optique de générer des revenus complémentaires, investir dans des actions à dividende peut être une excellente solution. Seulement, pour bénéficier de revenus constants et croissants, il faut apprendre à bien sélectionner les entreprises avant de franchir le cap et de décider de les posséder dans son portefeuille.
Certaines entreprises qui versent de généreux dividendes à leurs actionnaires peuvent présenter des difficultés financières. Étant attiré par de belles rentabilités, l’investisseur non-prudent pourra être séduit par ces actifs et prendra des risques à investir dans une société dont les finances ne sont pas saines.
Afin de minimiser les risques, une analyse ramenée à 10 critères peut vous aiguiller lors de vos sélections d’entreprises. Analyser ces 10 critères dans le détail permettra de valider que la société est saine et qu’elle sera en capacité de verser les dividendes de manière constante pendant de nombreuses années, tout en prenant de la valeur.
Note : Cet article est un article invité de Mélanie du blog Cash Flow Attitude.
Qu’est-ce qu’une action à dividende
Une action à dividende est une entreprise cotée en bourse qui verse une partie de ses bénéfices à ses actionnaires.
Investir dans ce type d’actif permet à la fois de générer des revenus passifs, mais aussi d’avoir la capacité d’augmenter plus rapidement ses investissements. En effet, en touchant ses dividendes, l’investisseur aura le choix de les réinvestir pour augmenter son patrimoine boursier, c’est ce qu’on appelle les intérêts composés.
Dépendant du secteur d’activité et de l’ancienneté, toutes les sociétés ne versent pas systématiquement des dividendes. Une entreprise qui vient d’entrer en bourse n’aura pas forcément la capacité de les verser, car tous ses bénéfices seront réinvestis pour lui permettre de favoriser sa croissance. Il en est de même pour une société dans un secteur qui est en constante adaptation comme la technologie, par exemple.
Il existe plusieurs catégories qui permettent de faire un premier tri sur l’ensemble de ces actifs. Appelés “aristocrates dividendes” ou kings dividendes, ces entreprises font partie d’une liste établie en fonction de plusieurs critères :
- Nombre d’années d’augmentation du dividende
- Capitalisation boursière
- Liquidité du marché
Chaque pays possède sa propre liste avec ses propres critères et est mise à jour en temps réel. Même si les États-Unis possèdent les entreprises les plus robustes versants des dividendes du marché mondial, l’Europe bénéficie de quelques très bons actifs.
Les 10 critères pour bien sélectionner une action à dividende
Pour analyser une entreprise et plus précisément une société versant des dividendes, il faut savoir étudier et valider chaque caractéristique financière de celle-ci sur une période minimale de 5 ans. Toutes ces données se trouvent dans les rapports financiers annuels. Il existe également des sites internet regroupant l’ensemble de ces données financières, tels que listés ci-dessous :
- Zonebourse
- Morningstar
- Yahoo Finance
1. Le chiffre d’affaires
Le chiffre d’affaires correspond au montant total des ventes de produits ou de services réalisé par une entreprise.
Analyser l’évolution de ce chiffre d’affaires sur une période de 5 ans donnera une bonne idée de la capacité commerciale de l’entreprise.
Il est toujours préférable de tabler sur une évolution constante plutôt qu’un chiffre d’affaires qui diminue pouvant traduire une éventuelle perte de vitesse de l’entreprise. Si, pour une année, les ventes ont diminué, il est nécessaire de comprendre pourquoi :
- Est-ce en lien avec une crise générale ou dans le secteur d’activité en question ?
Si ce n’est pas le cas et que ce chiffre d’affaires diminue d’année en année, on peut en conclure que l’attractivité de l’entreprise, son modèle économique ou son produit sont peut-être remis en question :
- Y a-t-il un nouveau concurrent qui vient prendre une part du marché de l’entreprise en question ?
Le but est de comprendre si la société fait face à une mauvaise passe tout en s’adaptant ou si son attractivité et sa renommée sont mises en doute.
2. Le résultat net
Le second élément à valider est le résultat net. Il correspond à la différence entre les produits (rentrées d’argent) et toutes les charges. Cette donnée nous démontre si l’entreprise est capable de générer des bénéfices, et donc d’être rentable.
Une évolution positive sur les 5 dernières années doit être constatée et constante.
Si cette évolution n’est pas constante et que l’entreprise a fait face à des difficultés sur une ou plusieurs années, il faudra analyser les statuts financiers plus dans le détail et comprendre :
- Est-ce dû à un moins bon chiffre d’affaires sur la même année ?
- Ses charges courantes ont-elles augmenté et si oui, pourquoi ?
- L’entreprise a-t-elle payé plus d’impôts que d’habitude ?
- L’entreprise a-t-elle fait l’acquisition d’une autre société ou a-t-elle développé un nouveau produit ?
3. Le rendement du dividende (dividend yield)
Lorsqu’on investit sur des actions à dividende, on est amené à vouloir rechercher des rendements élevés. Le rendement du dividende appelé « dividend yield » est le ratio entre le montant perçu par l’actionnaire et le prix de l’action.
En règle générale, plus le rendement est élevé et plus l’actif en question présente des risques financiers. En effet, si le montant du dividende est fort, est-ce que l’entreprise sera capable de le verser pendant les 20 à 30 prochaines années tout en l’augmentant chaque année ?
Un rendement fort n’est pas forcément signe d’une mauvaise santé financière. Dans certains cas et souvent lors d’une récession ou crise, l’opportunité se présente d’acquérir des actifs de qualité à un prix soldé faisant ainsi grimper le rendement du dividende instantané.
4. L’évolution des dividendes
Un des critères importants pour choisir une action est l’évolution du montant des dividendes de l’entreprise versés aux actionnaires.
Quand on décide d’investir sur ce type d’actif, on sélectionne un certain rendement du dividende. Il n’y a rien de pire pour un investisseur que de le voir diminuer au fil des années. Au contraire, on choisira plutôt des entreprises qui ont prouvé depuis les 20 dernières années qu’elles ont été capables d’augmenter leurs dividendes tous les ans. Ce montant continuera de grandir et l’investisseur bénéficiera d’une meilleure rentabilité année après année.
5. Le ratio de distribution (pay out ratio)
Pour continuer l’analyse de la société, un critère essentiel est le ratio de distribution. Aussi appelé « pay out ratio », c’est le ratio entre le montant du dividende et le résultat net de l’entreprise :
Il permet de savoir à quelle hauteur de son résultat net l’entreprise paye son dividende. Plus ce ratio est faible et mieux c’est. En effet, cela revient à dire que la société n’utilise pas tout son bénéfice pour payer les actionnaires, mais s’en sert pour les réinvestir ou les placer en fonds propres.
Dans la majorité des cas, on évitera les ratios de dividende supérieur à 70 %. Cette cible dépend du secteur d’activité. Une entreprise aura besoin de plus ou moins de trésorerie en fonction de son cœur de métier.
6. La marge nette
La marge nette mesure la rentabilité d’une entreprise et correspond au ratio entre le résultat net et le chiffre d’affaires. On a déjà vu que pour valider une entreprise, le résultat net doit être positif et croissant, les marges nettes devront suivre la même tendance sur les 5 dernières années.
C’est un élément intéressant pour comparer plusieurs sociétés entre elles dans le même secteur d’activité. On aura tendance à choisir une entreprise qui génère de meilleures marges.
7. Le levier financier (leverage)
Le levier financier, aussi appelé « leverage » permet de mesurer la capacité d’une entreprise à rembourser ses dettes. C’est une donnée qui détermine la santé financière d’une entreprise vis-à-vis de ses dettes. Il correspond au ratio entre les dettes et le résultat avant impôts, intérêts, dépréciations et amortissements (EBITDA).
Il existe des leviers financiers maximums à ne pas dépasser et dépendant du domaine d’activité. La technologie ou encore l’immobilier auront des ratios plus conséquents que des sociétés dans les biens de consommation défensive, ou l’industrie. En moyenne, il ne faut pas que cette donnée soit supérieure à 3.
8. Les capitaux propres
Les capitaux propres représentent l’actif net d’une société. Ce sont les ressources financières en déduisant toutes éventuelles dettes associées à ces actifs.
Ces capitaux propres se composent de :
- Capital social : lors de la création de la société, les actionnaires versent un certain montant sur les comptes de l’entreprise, c’est ce qu’on nomme le capital social.
- Réserves : ce sont les bénéfices des années antérieures qui ont été réinvestis dans l’entreprise.
- Résultat net de l’exercice : il correspond au résultat de l’année en cours.
Plus les capitaux propres sont importants et plus le risque de faillite est faible. Il est important de vérifier l’évolution de ces montants sur les 5 dernières années.
9. Le Free Cash-Flow (FCF)
Le Free Cash-Flow est le flux de trésorerie disponible après déduction de toutes les charges et investissements. C’est le véritable argent disponible à la fin de l’exercice fiscal.
Cette valeur est très importante pour comprendre la santé de l’entreprise et encore plus pour les actions à dividende. La question à se poser est de savoir si ce Free Cash-Flow rembourse le montant versé aux actionnaires chaque année.
Pour ce faire, vous pourrez calculer le montant total du dividende et le comparer au FCF sur les 5 dernières années :
Si le FCF ne paye pas les dividendes, cela peut présager que l’entreprise génère de la dette pour payer ses actionnaires et ne pourra pas continuer à faire de même pendant bien longtemps.
10. La valeur intrinsèque et le PER (Price Earnings Ratio)
La valeur intrinsèque et le PER ne permettent pas d’analyser la santé financière d’une société, mais de savoir si c’est le bon moment d’acheter cette action.
La valeur intrinsèque correspond à la valeur réelle de l’entreprise, en considérant tous ses actifs. Il est important de comparer cette donnée à la capitalisation boursière du moment. En effet, on peut se rendre compte que le marché sous-estime ou surestime la valeur réelle de la société.
Par exemple, un billet de 100 € a pour valeur intrinsèque 5 centimes (coût de production de ce billet) bien que sa valeur sur le marché soit de 100 €. Le marché surestime la valeur du billet.
Dépendant du secteur d’activité, il est plus intéressant d’acheter une action qui sous-estime la valeur de la société :
Le PER, Price Earnings Ratio, est un indicateur qui permet de savoir si le marché sous ou surestime la valeur de l’entreprise. Il se base sur les résultats de la société. C’est un ratio entre le prix de l’action et ses bénéfices nets.
Dépendant du secteur d’activité, on privilégiera d’acheter une action avec un PER actuel qui est inférieur à la moyenne de ses PER sur les 5 dernières années. De plus, on pourra le comparer au PER du secteur qui donnera un bon indicateur de la position de l’action par rapport à ses concurrents directs.
Un PER élevé peut signifier qu’il y a une décorrélation entre la confiance et la valeur que le marché donne à l’entreprise comparée à ses performances réelles. Par exemple, le plus marquant étant TESLA qui possède un PER très fort aux alentours de 100.
Il est assez difficile d’utiliser cet indicateur, car il dépend de l’entreprise et de son activité, mais il est certain que si le PER actuel est plus faible que la moyenne des PER des dernières années et celui du secteur, on peut considérer que le prix de l’action est avantageux.
Quel compte choisir pour détenir ses actions à dividendes ?
On a vu qu’investir sur des actions à dividendes a pour but de générer des revenus complémentaires ou d’utiliser au maximum les intérêts composés pour faire croître son patrimoine. Seulement, il faut bien définir dans quelle enveloppe fiscale investir pour bénéficier au maximum de ces bienfaits.
Il existe plusieurs méthodes à mettre en place pour réduire ou éviter de payer des impôts sur ses actions à dividendes. Pour les résidents fiscaux français, la solution sera de détenir des actions dans un PEA et de réaliser les arbitrages tout en conservant son capital à l’intérieur pour éviter l’impôt.
Malheureusement, les actions disponibles sur un PEA sont restreintes au marché français/européen. Il existe des bons actifs disponibles, mais le marché européen possède une culture du dividende très limitée comparée à nos voisins d’outre-Atlantique. La majorité de ces sociétés ne versent leurs dividendes qu’une seule fois par an.
Les États-Unis, quant à eux, ont une culture tournée vers les actionnaires. Les entreprises versent des dividendes entre 4 et 12 fois par an, ce qui présente de réels avantages pour l’investisseur. Il serait dommage de se priver d’actions de ce type en n’utilisant qu’un PEA. La seule solution sera de détenir ces actions en compte-titres. Il faudra donc prendre en considération, dans son calcul de revenus passifs nets, le montant de l’impôt.
Même si posséder des actions à dividende ne convient pas à tous les profils d’investisseurs, cette stratégie permet de compléter ses revenus. Choisie et analysée avec soin, une action à dividende permettra, sur le long terme, de gagner des revenus, mais aussi de générer de la valeur.
L’argent facile n’existe pas, il faut faire ses devoirs et analyser la santé financière de chaque actif avant de l’ajouter à son portefeuille. Le but premier n’étant pas de faire des gains en capital en une journée ou une semaine, mais bien d’avoir une vision à moyen/long terme.
Les clés étant des perspectives de croissance ou de maintien, un bon placement sur le marché, des investissements réguliers, une bonne gestion des ressources de l’entreprise et un dividende solide que la société versera généreusement pour de nombreuses années.
Notes d’Antonin : Je remercie Mélanie pour son excellent article, très utile et parfaitement documenté avec les bons critères à connaître pour choisir une action à dividende. Mon point de vue sur les dividendes est toutefois un peu différent du sien, d’où l’intérêt de publier l’article sur le blog, car il n’y a pas qu’une façon d’investir. J’ai tendance à considérer que si on souhaite investir à long terme pour faire fructifier un capital, il est important de maximiser l’effet des intérêts composés. Or, les dividendes doivent être réinvestis manuellement, ce qui engendre des frais supplémentaires. Je pense donc qu’il est préférable de viser des actions qui distribuent peu ou pas de dividendes, et de privilégier les ETF qui les capitalisent au lieu de les distribuer.
En revanche, pour les investisseurs qui cherchent à générer des revenus complémentaires immédiats, afin de vivre sur leur capital, les actions à dividendes sont un très bon choix, car elles permettent de dégager un revenu sans avoir à revendre ses actions. Cela permet de limiter ses frais, avec l’avantage psychologique de ne pas toucher à son capital, puisqu’on ne revend rien. Les investisseurs rentiers ou en passe de l’être peuvent donc mettre en place un portefeuille d’actions à dividendes, qui leur assurera un revenu régulier et passif, qu’ils pourront éventuellement associer avec des obligations high yield, voir des SCPI, moins volatiles, pour diversifier leurs sources de revenus passifs.
Bonjour Antonin et Mélanie,
Beaucoup de personnes choisissent leurs actions à l’affect ou parce qu’elles ne peuvent que « progresser dans le temps » mais sans jamais effectuer d’analyses poussées sur l’entreprise. Cet article donne les principaux points à étudier pour investir dans une entreprise avec le moins de risque possible. Ceux qui investissent « au hasard » n’ont plus d’excuses.
Merci pour cet article très complet !
Bonjour Julien,
J’ai un exemple qui illustre parfaitement ce que tu décris : un investisseur m’a récemment contacté car il avait investi plusieurs milliers d’euros sur un titre, qui a connu une chute de – 75 % un an après qu’il ait investi. J’ai regardé l’entreprise en question, elle ne générait aucun bénéfice et était en perte depuis plusieurs années : rien de surprenant donc. L’investisseur m’a avoué y avoir investi, car le titre était conseillé dans des lettres de conseils boursiers, et que « ça devait monter ».
Seulement, la bourse ne marche pas comme ça. Investir dans des titres individuels demande énormément de travail d’analyse (les critères évoqués dans cet article le montrent), des connaissances très poussées, et une psychologie d’investisseur de haut niveau. Et si on veut être certain de ne pas se tromper, il suffit de diversifier en suivant les indices, ce qui permet de battre 96 % des investisseurs (spéculateurs) qui choisissent des actions.
Souvent, j’ai remarqué que plus le niveau d’études d’un investisseur est élevé (et c’est le cas de celui qui m’a contacté), plus il cherche à compliquer les choses, et moins il a de résultats (et pour couronner le tout, moins il se remet en question, car il se croit plus intelligent).
Quant aux vendeurs de lettres d’information, ils n’ont pas de boule de cristal, et il s’agit souvent de piètres investisseurs. Leurs conseils boursiers ne sont clairement pas à suivre, car ils ne sont pas meilleurs que ceux de singes qui tireraient des numéros au hasard, en référence à une célèbre étude.
C’est toujours dangereux de croire que l’on est le meilleur dans un domaine et de ne jamais se remettre en question.
Dans ce cas, les personnes croient avoir raison à 100% et augmente drastiquement leurs chances de faire des erreurs, comme elles sont trop sûres d’elle-même !
Merci de nous le rappeler Antonin 🙂
Bonjour Antonin et Mélanie, merci pour cet article de qualité !
Je suis ravi de découvrir le blog de Mélanie par la même occasion et de connaître de nouveaux critères de sélection que je n’ignorais, comme le leverage et le FCF.
Excellent week-end !
Bonjour,
Je suis totalement novice pour les calculs… Sur Zone bourse si on prend exemple de Coca Cola sur l’année 2021. Pour calculer le PER il faut diviser le montant total des actions versés (donc Dividende par action multiplié par le nombre d’action émise par la société / bénéfice net j’ai juste ? ).
Désolé je n’ai pas une intelligence mathématique significative mais les montants exprimés sur zone bourse sont en million de $. Donc 9771 (résultat net) = 9 milliard 771 million ?
Bonjour Valentin,
Pour calculer le PER : cours de l’actions / bénéfice par actions (soit bénéfice total / nombre d’actions).
Si je fais le calcul du PER pour Coca en 2021 avec les chiffres sur Zone Bourse : 59,2 $ / (9 771 M$ / 4 319 M) = 59,2 / 2,26 = 26,2
Les montants sont bien en millions, donc on a effectivement un bénéfice de 9,7 milliards.
Bonjour,
Merci pour votre réponse. En fait je voulais parler du pay out ratio pour coca…
Le boulet désolé 🙄. Je me suis emmêlé les pinceaux. Mais avec l’exemple du PER je pense avoir compris.
Pas de soucis ! Les ratios boursiers sont nombreux et beaucoup se basent sur des éléments proches, facile de confondre 🙂