Ces dernières années, j’ai remarqué que beaucoup d’investisseurs étaient convaincus que les actions américaines étaient les plus performantes. Certains en font d’ailleurs une règle absolue, comme figée dans le marbre.
Cette idée est particulièrement répandue chez les jeunes et les nouveaux investisseurs, qui ont commencé à investir après 2008.
Le corollaire de cette idée étant qu’il faut placer l’indice S&P 500, voir le Russell 2000, au cœur de tout bon portefeuille d’investissement.
J’ai ainsi pu observer des portefeuilles construits en surpondérant largement le marché américain, soit via l’indice S&P 500, soit en le combinant avec le MSCI World et le NASDAQ, ou encore, avec les trois en même temps ! (au passage, bonjour les doublons et la dipiresification).
Pourtant, l’idée selon laquelle les actions américaines sont forcément les plus performantes est liée au dernier cycle à court terme. Elle souffre également de plusieurs biais psychologiques.
Plusieurs raisons expliquent cette croyance bien ancrée. Voyons lesquelles et comment la relativiser.
1. Les performances récentes du marché américain
Une première explication tient au biais des performances récentes, établies lors du dernier cycle. Si l’on observe la performance des actions américaines depuis la fin de la crise de 2008, alors effectivement, les choses semblent bien établies.
On ne peut que constater que les États-Unis sont largement en tête parmi les grandes zones économiques mondiales, avec une croissance de 16,5 % par an pour le MSCI USA (un quasi-équivalent du S&P 5OO).
Voici les indices utilisés pour représenter les zones géographiques sur le graphique suivant :
- États-Unis : MSCI USA
- Europe : MSCI Europe
- Pacifique ex-Japon : MSCI Pacific ex-Japan
- Asie émergente : MSCI EM Asia
- Japon : MSCI Japan
- Amérique Latine : MSCI EM Latin America
Le graphique parle de lui-même, mais comme il est bon de le rappeler, les performances passées ne sont pas indicatrices des performances futures.
C’est d’autant plus vrai si l’on considère une action, un pays ou un secteur en particulier.
L’économie est faite de cycles qui se déroulent sur des années, voire des décennies. Or, nous avons souvent trop la tête dans le guidon, à observer la performance journalière, mensuelle et annuelle des actifs.
En prenant un peu de recul et en remontant suffisamment loin, par exemple sur 35 ans, pour continuer d’inclure les pays émergents, on constate que les actions américaines n’ont pas été les plus performantes.
L’Amérique Latine, qui paraissait assez peu productive sur la dernière décennie, se retrouve en tête des marchés les plus performants depuis 1987.
À noter que la zone Pacifique est comprise sans le Japon, détaché, car son poids fait qu’il influence presque à lui seul cette zone.
Si l’on remonte encore plus loin, depuis la fin des années 1970 (sans les pays émergents, dont l’historique ne va pas plus loin), on se rend cette fois compte que les États-Unis ont été moins performants que les pays Nordiques.
Voici les indices utilisés pour représenter les zones géographiques sur le graphique suivant :
- Pays Nordiques : MSCI Nordic Countries
- Canada : MSCI Canada
Certes, les pays Nordiques ne constituent qu’une petite fraction de l’Europe (Danemark, Finlande, Norvège, Suède), mais cela démontre une chose : pour n’importe quelle période qui soit suffisamment longue pour être représentative, on peut trouver des zones géographiques ayant mieux performé que les États-Unis.
En outre, il existe de fortes disparités entre pays, à l’intérieur d’une même zone géographique. Voici un exemple parlant avec les pays européens.
Voici les indices utilisés pour représenter les zones géographiques sur le graphique suivant :
- Suisse : SMI
- Pays-Bas : AEX
- France : CAC 40
- Allemagne : DAX
- Italie : FTSE MIB
C’est cette hétérogénéité de pays qui fait que l’Europe n’apparaît jamais première, ni jamais dernière.
En isolant les pays individuellement, et en imaginant qu’on pourrait remonter suffisamment loin, on trouverait sans doute beaucoup de pays dont les actions ont été plus performantes que celles de l’oncle Sam.
Cette observation permet de tirer une conclusion : chaque pays/zone géographique connaît des périodes de surperformance, lors desquelles la croissance de leurs actions domine celle du reste du monde.
Il s’agit d’évolutions cycliques, car elles ne durent pas éternellement. Ainsi, aucune décennie n’a été semblable à la précédente, si l’on observe qui a produit la meilleure performance :
- Années 80 : Japon
- Années 90 : États-Unis
- Années 2000 : Amérique Latine
- Années 2010 : États-Unis
Certes, les États-Unis apparaissent deux fois, mais au prix d’un violent creux entre les décennies 90 et 2010. Voici différents graphiques pour ces décennies successives.
Années 80 : Le Japon domine en créant une bulle
Si les années 80 ont peut-être été les plus prolifiques de l’histoire (L’Europe et les États-Unis ont connu des taux de croissance respectifs de 20,1 % et 17,8 % par an), c’est bien le Japon qui fut le paradis des investisseurs, avec un taux de croissance moyen de son marché de 30 % par an !
Il s’agissait d’une énorme bulle (le Japon était alors la première capitalisation boursière mondiale, devant les Etats-Unis), qui mettra ensuite deux décennies pour se dégonfler.
Années 90 : Les États-Unis finissent 1ers sur le fil
Les États-Unis ont dominé les années 90, en passant devant l’Amérique Latine lors des deux dernières années.
On pourra d’ailleurs noter qu’à l’instar du Japon dans les années 80, les États-Unis ont fini la décennie 90 par une autre bulle, celle des dot-com.
De son côté, le Japon, premier lors de la décennie précédente, se retrouve cette fois bon dernier.
Années 2000 : Prime aux pays émergent
La décennie 2000 a été dominée par l’Amérique Latine, qui a enchaîné deux très bonnes décennies.
Les zones du Pacifique ex-Japon et de l’Asie émergente sont revenues sur le devant de la scène, après une décennie 90 compliquée.
Enfin, les États-Unis, qui avaient fini les années 90 en sprint, ont vu leur bulle exploser, pour finir dernier, jusque devant le Japon qui purgeait encore son énorme bulle des années 80.
Années 2010 : Retour fracassant des États-Unis
La dernière décennie a vu les États-Unis revenir en première position, tandis qu’inversement, l’Amérique Latine est passée de la première à la dernière place.
De son côté, le Japon semblait enfin avoir fini de purger sa bulle, en ayant à nouveau des performances dans la moyenne.
Fait notable, les zones Européennes, Asiatiques et Pacifiques ont obtenu exactement la même performance sur 10 ans.
Quelle conclusion tirer de l’observation de ces différentes décennies ? Les marchés financiers sont toujours en évolution constante, selon des cycles qui se suivent, mais sans jamais se ressembler.
Et pour cause, les arbres ne montent jamais jusqu’au ciel, et toute zone (ou secteur) ayant affiché une surperformance pendant une période, en subit souvent le contrecoup lors de la période suivante.
Les excès, à la hausse comme à la baisse, finissent toujours pas être corrigés par un retour à la moyenne.
2. Le renforcement récent du dollar face à l’Euro.
Une autre explication tangible de la surperformance des actions américaines ces dernières années est le renforcement du Dollar face à l’Euro.
Depuis le pic historique à 1,59 Dollar pour 1 Euro atteint mi 2008, l’Euro s’est affaibli jusqu’à valoir environ 1,1 Dollar.
L’Euro a donc perdu en valeur face au Dollar, ce qui a artificiellement boosté la performance des actions américaines détenues dans un portefeuille en Euros.
Si l’on observe la performance du S&P 500 hedgé en euros (un S&P 500 qui ne subit pas les variations du taux de change EUR/USD), on obtient la performance « réelle » des actions américaines, à taux constant.
Depuis la fin de la crise de 2008, la S&P 500 a progressé à un rythme de 16,3 % par an, tandis que le S&P 500 hedgé en Euros n’a progressé que de 12,8 % par an.
Ce boost de performance annuelle significatif (3,5 %) explique en partie la domination des actions américaines, les plus performantes de la décennie 2010.
Si l’on intègre le S&P 500 hedgé en euros à la place du MSCI USA (dont je n’ai pas pu afficher la version hedgée en euros sur le graphique), on obtient une meilleure représentation de la performance réelle du marché américain face à ceux des autres zones géographiques depuis 2008.
Voici les indices utilisés pour représenter les zones géographiques sur le graphique suivant :
- États-Unis : S&P 500 EUR Hedged
Les actions américaines sont toujours les plus performantes, mais leur domination est bien moins prononcée (le graphique est à comparer avec le tout premier de l’article). On remarque qu’elles se sont surtout détachées du reste du monde lors des 5 dernières années (2017-2022).
Ces années ont vu le marché américain tiré vers le haut par les bons résultats des GAFAM, alimentés en partie par la politique d’impression monétaire de la FED et la distribution d’argent gratuit à la suite de la crise de la Covid-19. Mais revenons-en aux changes.
Si l’on observe l’évolution des cycles du couple Euro/Dollar, on peut voir qu’après une chute amorcée à la fin des années 90, l’Euro s’est renforcé face au Dollar jusqu’en 2008, avant de rechuter progressivement lors de la décennie 2010.
Si le point bas a été atteint à l’automne 2022 (1 Euro = 1 Dollar) et que nous sommes désormais entrés dans un nouveau cycle d’appréciation de l’Euro face au Dollar (ce qui reste à confirmer), la situation sera alors inversée : la performance en Euros des actions américaines sera amoindrie par la chute du Dollar face à l’Euro.
Par conséquent, si au cours de la décennie actuelle, l’Euro revient quelque part entre 1,2 et 1,4 Dollar, les actions européennes partiront avec un net avantage sur les actions américaines.
3. Le biais de confirmation
Lorsque nous sommes convaincus par une idée, nous avons inconsciemment tendance à aller chercher des éléments qui vont nous conforter dans cette idée. Au contraire, nous évitons soigneusement de considérer les éléments pouvant nous donner tort.
Ainsi, il est très facile de trouver des arguments pour nous rassurer sur le fait qu’il est logique de considérer que les actions américaines soient les plus performantes :
- Wall Street est le cœur de la finance mondiale.
- Le NYSE (New York Stock Exchange), la plus grande place boursière mondiale, et le NASDAQ, qui n’est pas loin derrière, sont à New York
- Les États-Unis sont le pays de l’argent, des dollars, d’Elon Musk, Jeff Bezos et Bill Gates.
- Ce pays compte beaucoup des plus grandes entreprises mondiales, les GAFAM, et Apple vaut autant que l’ensemble du CAC 40.
- Les entreprises les plus innovantes sont toujours là-bas, et plus seulement dans la Silicon Valley.
- Les États-Unis sont toujours la première puissance mondiale, que ce soit au niveau économique, financier, culturel ou militaire.
- Ils représentent plus de 60 % de la capitalisation boursière mondiale.
Bref, il est facile de se convaincre, avec des éléments factuels, qu’il est parfaitement logique que les actions américaines continuent leur domination.
Le biais de confirmation fonctionne de manière automatique, sans effort. Pour le contrer, il est nécessaire d’aller chercher volontairement des arguments contraires, afin de pouvoir soupeser le pour et le contre, rationnellement.
Car il existe également de nombreuses raisons de croire que les actions américaines, qui se sont montrées les plus performantes récemment, ne sont pas destinées à le rester.
Pour cela, il nous faut à nouveau prendre un peu de recul. De notre vivant, nous avons toujours connu les États-Unis en tant que grande superpuissance (à moins que vous n’ayez 120 ans).
Mais ici aussi, il est question de cycles. À la fin du 19ᵉ siècle, le Royaume-Uni était à la fois la première puissance et la première capitalisation boursière mondiale.
Le marché américain ne comptait alors que pour 15 % de la capitalisation boursière mondiale, soit quatre fois moins qu’aujourd’hui (ci-dessous).
Si l’on pouvait remonter jusqu’au début du 19ᵉ siècle, on considérerait alors probablement les États-Unis comme un petit pays émergent.
Aujourd’hui, malgré leur domination financière, il existe des signes qui montrent que les États-Unis sont sur la pente descendante, et que leur statut de grande puissance est challengé par un autre état rival : la Chine.
Si l’empire américain décline face au reste du monde, comment espérer que ses actions restent en tête à long terme ? (à court terme, c’est cependant tout à fait possible, car les plus grosses entreprises mondiales, celles qui réalisent le plus de chiffres d’affaires, sont toujours américaines).
Cependant, le graphique précédent ne veut pas dire qu’aujourd’hui, il faille tout miser sur le marché chinois. La direction des courbes reflète uniquement le passé, elle donne une tendance, mais ne peut prévoir l’avenir.
La Chine est encore considérée comme un marché émergent, non sans raison : son marché n’est pas aussi bien structuré, contrôlé de manière indépendante (les entreprises chinoises restent sous la coupe de leur gouvernement, certains PDG disparaissent, etc), ni aussi représentatifs de l’économie que ses homologues des pays développés.
Même si l’économie chinoise continue de croître à un rythme supérieur à la moyenne mondiale, il se peut très bien que cela ne se reflète pas directement dans le cours de ses actions.
De plus, l’histoire récente a montré qu’un gouvernement autocratique pouvait prendre des décisions visant purement et simplement à renforcer son image, au détriment de son économie. Cela s’est vérifié avec le maintien du confinement en Chine, bien plus longtemps que partout ailleurs dans le monde.
Enfin, un conflit militaire avec Taïwan dans les 10 ou 20 prochaines années pourrait également faire fuir les investisseurs, en provoquant en outre une crise économique mondiale de grande ampleur si la production des semi-conducteurs taïwanais s’arrêtait net.
La Chine a très certainement sa place au sein d’un portefeuille long terme équilibré, mais il est toujours risqué de faire des paris, en surpondérant une zone particulière.
Si l’on en revient aux États-Unis, le fait qu’ils soient en déclin relatif ne signifie pas qu’il faille tomber dans l’excès inverse, qui consisterait à supprimer toutes les entreprises américaines de nos portefeuilles.
Malgré son déclin au début du siècle dernier, le Royaume-Uni reste toujours aujourd’hui la 5ᵉ puissance économique mondiale, et la 3ᵉ capitalisation boursière mondiale.
Ainsi, il est peu probable que les États-Unis deviennent une puissance mineure, simplement parce que la Chine ou l’Inde finiraient par leur passer devant.
4. Les actions américaines sont surévaluées
Cela tient probablement au premier point (excellentes performances récentes) et au troisième (biais de confirmation), qui ensemble renforcent l’appât du gain à destination des actions américaines. Car le fait est que les actions américaines sont chères et que ce marché semble surévalué.
L’appétence pour l’outre-Atlantique (qui s’accompagne parfois d’un auto-dénigrement quand il s’agit d’actions françaises ou européennes) a conduit à une survalorisation des actifs américains par rapport au reste du monde.
En d’autres mots, à bénéfice égal, les actions américaines sont plus chères que presque partout ailleurs dans le monde.
On observe la même chose avec le P/BV ratio, qui nous renseigne sur le rapport entre le prix de marché et la valeur comptable des entreprises.
La survalorisation des actions américaines est encore plus frappante avec ce ratio comptable.
Lorsqu’un actif est surévalué, son potentiel de hausse future est nécessairement inférieur aux autres, car il est déjà entamé.
Ces graphiques révèlent que la domination récente des États-Unis s’explique aussi en partie par la loi de l’offre et de la demande : un plus grand nombre d’investisseurs se sont tournés vers les États-Unis, ce qui a accéléré la hausse de leurs actions, qui à son tour a renforcé l’attirance pour le marché américain.
Ce genre de boucles engendre des prophéties auto-réalisatrices à court terme : si un grand nombre d’investisseurs se tournent vers les actions américaines, convaincus qu’elles seront les plus performantes, alors elles le deviendront.
Inversement, des pays comme le Japon, qui n’intéressent pas vraiment les masses, ont naturellement des actions moins valorisées, et donc moins chères à bénéfice égal. Moins demandées, les actions japonaises se sont révélées moins performantes, ce qui a renforcé la faiblesse de la demande.
Ces boucles de rétroactions finissent nécessairement par prendre fin un jour ou l’autre, pour la bonne et simple raison que les arbres ne montent pas jusqu’au ciel. Historiquement, tous les actifs/pays/secteurs ayant connu des phases de survalorisation (ou des bulles dans les cas extrêmes) ont toujours subi un retour à la moyenne.
C’est la même chose pour les actifs/pays/secteurs abandonnés pendant un certain temps par les marchés. Ils finissent par revenir sur le devant de la scène.
Les marchés financiers sont par nature excessifs, que ce soit à la hausse ou à la baisse. Pourtant, ces excès finissent toujours par être corrigés, soit progressivement, soit par un krach financier ou une crise économique.
La survalorisation actuelle des actions américaines a gonflé le poids des États-Unis dans la capitalisation boursière mondiale (plus de 60 %), alors qu’ils détiennent moins de 15 % du PIB mondial.
Mais alors, quelle serait la pondération idéale des actions américaines dans un portefeuille ?
Il est difficile de répondre à cette question, car il n’existe aucune mesure absolue qui fasse consensus partout, ni qui soit suffisamment précise pour y répondre.
Cependant, si on considère qu’à bénéfice égal, les action américaines sont 20 % plus chères qu’ailleurs dans le monde (le P/E ratio du MSCI ACWI est inférieur de 20 % au P/E ratio du MSCI USA), on pourrait considérer que ce même pourcentage correspond à « l’excès » de valorisation des actions américaines.
Une sous-performance de 20 % du marché américain par rapport au reste du monde ne représenterait alors simplement qu’un simple retour à la moyenne.
Il est également possible d’observer d’autres indices que le MSCI ACWI, avec une construction différente :
- Le MSCI ACWI Enhanced Value, qui ne contient que des actions d’entreprises dont la valorisation reste raisonnable.
- Le MSCI ACWI Equal Weighted, qui pondère de manière égale chaque entreprise du MSCI ACWI.
Chacun de ces indices élimine naturellement les excès du marché, et nous offre une vision du monde assez différente, dans laquelle le marché américain n’occupe plus qu’entre 20 et 25 % de la capitalisation boursière mondiale.
Selon ces méthodes de construction d’indices, la Chine ou le Japon se hissent à hauteur des Etats-Unis (non pas que ces pays aient réellement le même poids que les Etats-Unis, mais leurs faibles valorisations actuelles les conduisent à être bien mieux représentés).
Notons d’ailleurs que ces pourcentages ne représentent pas le poids que devraient avoir les Etats-Unis, car ces indices éliminent un certain nombre d’entreprises (ou en réduisent arbitrairement le poids), qui représentent une bonne part de l’économie mondiale.
Comparativement à leur poids dans le MSCI ACWI classique (> 60 %), ou si l’on considère un portefeuille raisonnablement valorisé (20 à 25 %), la pondération idéale des Etats-Unis se situerait donc quelque part entre les deux. 40 % pourrait être un juste milieu (il n’existe bien évidemment pas de méthode scientifique incontestable pour l’évaluer).
Reste qu’actuellement, le poids des Etats-Unis dans la capitalisation boursière mondiale est particulièrement élevé, et que l’histoire nous montre que les dominations, comme les excès de valorisation, ne durent pas indéfiniment.
Un retour à la moyenne serait alors synonyme d’un déclin relatif des actions américaines, qui ne seraient alors plus aussi performantes, durant un certain temps.
Qui sera le vainqueur de la décennie 2020 ?
Les 4 points précédents nous ont montré qu’il y avait au moins autant (sinon plus) de raisons de penser que la domination des Etats-Unis soit principalement cyclique et liée à une concordance de différents facteurs, plutôt qu’il s’agisse de l’ordre naturel des choses.
Mais alors, puisque les évolutions sont cycliques, quelle zone géographique dominera la décennie 2020, en lieu et place des Etats-Unis ? (sachant qu’historiquement, les décennies se suivent sans se ressembler). C’est la question à un million d’euros.
Cela dit, en considérant qu’ils n’ont pas fait partie des meilleures performances récentes, et qu’ils n’ont pas de valorisation excessive comparativement au reste du monde, l’Europe, l’Asie émergente, voir le Japon, sont à mon sens de bons candidats (je ne me mouille pas trop !).
Je n’ai pas de boule de cristal, mais si les actions de l’une de ces zones devaient se montrer plus performantes que les actions américaines lors de la prochaine décennie, le principe selon lequel « les gagnants d’hier seront les perdants de demain » (et inversement) serait respecté.
Pour autant, il me semblerait risqué de surpondérer ces zones dans les prochains années, car de nombreux événements peuvent survenir et remodeler les forces en présence. Les marchés peuvent également se montrer irrationnels pendant plus d’une décennie, et partir dans des excès formant des bulles, comme celle du Japon dans les années 80, ou celle des valeurs technologiques à la fin des années 90.
On peut simplement noter que jusqu’ici, les Etats-Unis sont toujours devant, car les deux premières années de la décennie 2020 s’intègrent à mon avis dans le même mouvement d’après-crise de 2008, caractérisé par une baisse progressive des taux d’intérêt et beaucoup d’impression monétaire.
Depuis, l’environnement politico-économique a évolué, avec les crises énergétique et climatique, le retour de l’inflation, la hausse des taux et la guerre en Ukraine.
En conséquence, ajouté au fait qu’elles ont dominé la décennie 2010, je serai très surpris de constater que les actions américaines soient à nouveau les plus performantes d’ici à 2030.
Nous sommes passés dans un nouveau cycle. Si l’avenir nous dira qui en profitera le plus, seule une bonne diversification permettra de s’exposer aux gagnants de demain.