Les 3 grands mythes de l’investissement en bourse

Mythes de l'investissement en bourse

Comme tous les mythes, les mythes en investissement sont fondés sur des croyances communes. Ces croyances sont tellement puissantes qu’elles structurent inconsciemment notre mode de pensée. Nous les pensons inscrites dans le marbre, si bien que nous avons rarement l’idée de les remettre en question.

Pourtant, un mythe est un leurre derrière lequel se cache des vérités simples pour celles et ceux qui tenterons de le dépasser.

Dépasser les principaux mythes de l’investissement en bourse permet à la fois de se défaire de ses croyances limitantes, et d’adopter à leur place de bons principes d’investissement. Ils vous permettront d’éviter de tomber dans les pièges communs, ceux qui attrapent souvent les débutants.

Mais tout commence par la déconstruction du mythe, pas à pas. Dans le monde de l’investissement financier, il y a trois mythes qui ont la peau dure et qu’il me semble important de déconstruire. Détruisons-les !

Mythe N°1 sur l’investissement : Suivez les conseils des experts et confiez votre argent aux professionnels

Ce premier mythe sur l’investissement comporte deux facettes :

  • Placer son argent en suivant les conseils d’experts
  • Investir son argent dans un fonds commun de placement

Pourtant, ces deux facettes ont un point en commun: vous vous en remettez à quelqu’un d’autre pour prendre la bonne décision. Nous avons donc là un mythe en deux parties.

1) Les professionnels vous garantissent des rendements élevés

Vous pensez qu’un professionnel qualifié sera à même de faire travailler votre argent efficacement ? Détrompez-vous. Plusieurs études ont démontré que 95% des fonds communs de placement ne battent pas le marché sur le long terme. Ce qu’on appelle le marché est en un indice boursier qui réunit les plus grosses entreprises cotées d’un pays (le CAC40 en France, ou le S&P500 aux États-Unis). L’indice boursier est souvent utilisé à titre de comparaison pour évaluer la performance des fonds communs de placement.

Pour enfoncer le clou, plusieurs expériences ont mis en évidence que des singes à qui on a fait choisir des actions au hasard en lançant des fléchettes les yeux bandés (ce n’est presque pas une blague !) ont mieux réussi que les gérants de fonds.

Qu’est-ce que cela signifie pour vous ? Simplement que vous obtiendrez de meilleures performances que la quasi-totalité des fonds en achetant directement les actions de chaque entreprise faisant partie d’un indice boursier. Mais en réalité, il y a encore plus simple que d’acheter autant d’actions différentes (voir le mythe numéro 3 sur l’investissement avec les trackers d’indices).

Qu’en est-il des fonds notés 5 étoiles sur Morningstar ? De ces 5% qui ont battu le marché ? Peut-être suffit-il d’éviter les 95% qui font moins bien que le marché, pour se concentrer sur la crème de la crème ?

Imaginez une firme qui lance cinq fonds différents. Au bout d’un certain temps, elle stoppe les quatre moins bons et elle garde le meilleur, qui a très bien performé. Elle en fait la publicité pour faire valoir ses compétences. Il n’y a pas tromperie sur ce fond: il a bien réalisé une très belle performance. Mais elle ne dit pas un mot sur les autres fonds qu’elle a fermé. Certains de ces fonds ont pu avoir des rendements catastrophiques: une bonne raison de les faire disparaître du catalogue des produits ! Plus personne ne se doute alors de leur existence (à part ceux qui ont investi dedans et qui n’ont plus que leurs yeux pour pleurer).

Ce genre de pratique est courant dans l’industrie des fonds de placement. De plus, statistiquement, les meilleurs fonds qui battent le marché ne sont jamais les mêmes années après année. Inutile d’espérer qu’un miracle ne se reproduise encore et encore !

Non seulement les fonds communs de placement font moins bien que le marché (et les singes !) en moyenne, mais les frais qu’ils appliquent sapent une grande partie de la performance réalisée. Le magazine Forbes s’est penché sur la question et a dévoilé le pot aux roses.

Il y a d’abord les frais affichés, qui sont moyenne de 1,19%. Mais il y a aussi souvent des frais cachés (1,44% en moyenne), des frais liés au manque d’efficience fiscale (1,1%), voir des frais liés au comportement malhonnête de certains fonds (2,49%).

Ces deux derniers types de frais sont un peu techniques. Pour faire simple, ils sont principalement dû au fait que certains fonds multiplient les opérations pour se départir des actifs dont la performance a été mauvaise. Le but ? Se refaire une beauté pour attirer de nouveaux clients. Sauf que ce sont les clients qui sont déjà présents dans le fond qui en paient le prix.

Il faut savoir qu’une différence de seulement 1% dans les frais peut manger 1/3 de la performance d’un placement sur 30 ans.

Heureusement il existe des outils de placement accessibles à tous, dont les frais sont dérisoires et totalement transparents, et sans mauvaises surprises. J’en parle dans le mythe N°3 sur l’investissement.

Les points précédents doivent déjà vous donner envie de fuir les professionnels. Mais ce n’est pas fini: les rendements affichés ne correspondent pas au rendement réel.

Les rendements affichés sont en fait les rendements moyens. Imaginons qu’un fonds affiche le rendement suivant sur deux ans: un gain de 50% la première année, puis une baisse de 40% la seconde année. Le rendement moyen est de 50-40 = 10% sur deux ans. Vous vous dîtes: « 10% ! Chouette, voici un bon rendement ! ». En réalité, vous n’avez pas gagné 10%, vous avez perdu 10% ! Comment est-ce possible ?

C’est juste mathématique. Pour compenser une baisse de 40%, il faut un gain de 66,7%. Faisons le calcul. Vous avez 100€. La première année à +50% vous amène à 150€. Facile ! La seconde vous fait perdre 40%: 150€ – (150*40/100) = 90€. Mince alors, vous avez perdu de l’argent avec un placement dont le rendement moyen est de +10% ! Peu de personnes sont conscientes de cette règle mathématique et ne vont pas chercher plus loin que le rendement affiché. Les fonds de placement ne s’en plaignent pas…

Enfin, il faut aussi savoir que la plupart des gestionnaires de fonds ne détiennent aucune part dans les fonds qu’ils gèrent. Ils recommandent donc à leur client d’investir dans des fonds dont eux-mêmes ne veulent pas ! Faites ce que je dis mais pas ce que je fais…

2) Les experts vous donnent de bons conseils

En bourse, prédire comment va évoluer le marché est presque impossible. « Presque » car il y a quelques énormes fonds de gestion qui sont dotés d’instruments tellement sophistiqués qu’ils arrivent à surpasser le marché boursier. En réalité, ils ne prévoient pas l’avenir mais leurs outils leur donnent un léger temps d’avance sur les autres gérants de fonds, ce qui leur permet d’anticiper avec de meilleures probabilités certains mouvements. Ray Dalio et sa société de gestion Bridgewater Associates en sont un bon exemple. Leurs performances surpassent de loin la quasi-totalité des autres gérants ainsi que celle du marché. Point d’euphorie cependant : ces fonds-là sont réservés aux très gros patrimoineset certains sont mêmes fermés aux nouveaux investisseurs.

Mais il ne faut pas se leurrer. Les gens comme Dalio sont une toute petite minorité.

En revanche, les conseils des magazines, consultants et experts à la TV sont à prendre avec des pincettes (et des très grosses pincettes !). Ils font des recommandations de placement et des prévisions de marché car cela fait de l’audimat, et donc des revenus publicitaires. En vérité, leurs conseils n’engagent que ceux qui les suivent. Et si leurs conseils étaient vraiment pertinents, ils ne seraient pas à la TV en train de donner des conseils gratuits.

Par exemple : le site Le Revenu sélectionnait au mois d’août 2017 quatre valeurs pour gagner en bourse avec un PEA. Voici les résultats un an plus tard (août 2018): Engie -9,1%, Alès Groupe -45,7%, Cellectis +20,1%, AB Inbev -13,7%. En cas d’égale répartition de ces quatre titres, cela donne une performance de -12,1%. Pas très brillant !

Sur la même période, le CAC40 gagnait quant à lui 6,4%. En mesurant l’écart de performance entre les deux, les conseils de « Le Revenu » vous auront fait perdre 18,5% sur votre PEA par rapport à un simple investissement automatisé dans le principal indice français (le CAC40). Sans commentaires…

Autre exemple: BFM Business propose depuis 2015 une « Sélection Intégrale Placements » composée de 20 titres choisis par trois experts. Ceux-ci sont titulaires d’un Master en Finance, ou président d’une société de gestion, ou encore expert-comptable et président de la SFAF (Société Française des Analystes Financiers). Ce sont sans aucun doute des personnes qui ont des connaissances très pointues en économie et en finance.

Quelle aurait été votre performance si vous aviez suivi leurs conseils d’investissements depuis le 15 janvier 2015 (date de lancement de leur portefeuille) ? Au moment où je rédige cet article (janvier 2019), leur portefeuille a perdu 9,75% en quatre ans. Dans le même temps, le CAC40 a gagné 11,6%. Là encore, il y a une énorme différence de performance.

Suivre les conseils de BFM vous aurait fait perdre 21,35% par rapport à un simple investissement dans le CAC40. Là encore, un joli mythe, no comment !

Dernier exemple, plus ancien: en 2001, la société Enron a fait faillite. Dans les mois qui ont précédé, plusieurs grandes banques et fonds de placement ont continué à inciter les investisseurs à acheter des actions Enron: Bank of America, Goldman Sachs, le Crédit Suisse… Et pourtant les comptes publics de l’entreprise, accessibles à tous, indiquaient qu’elle perdait énormément d’argent et qu’elle allait droit dans le mur. Et c’est ce qui s’est passé.

Conclusion : Fuyez les conseils des experts, et ne confiez pas votre argent à un professionnel. Si vous voulez de bons conseils, lisez des livres.

Mythe N°2 sur l’investissement : Il faut prendre beaucoup de risques pour gagner gros

Il s’agit peut-être là de l’un des plus grand mythes de l’investissement en bourse. Celui qui vous dit que si vous voulez gagner gros, il faut prendre de gros risques (ou alors escroquer les gens, comme dans le film « Le Loup de Wall Street »).

Ce mythe a peut-être pour origine des investisseurs qui ont réussi de gros coups en prenant des risques démesurés. Leur réussite spectaculaire a été largement médiatisée, laissant penser que la bourse revient à jouer à quitte ou double au casino. « Soit je deviens millionnaire, soit je finis ruiné au fond du caniveau ! »

Jérôme Kerviel en est un bon exemple. Le trader, capable de faire gagner des sommes folles à sa banque (la Société Générale) en prenant de très gros risques, a failli la faire couler quand sa réussite l’a abandonnée.

L’actuel président Américain, Donald Trump, est aussi l’archétype de ce genre de personnage: présenté comme le Self-Made-Man qui a créé sa fortune, il a tout perdu en se retrouvant avec des dettes énormes. Mais il a su se relever pour rembourser ses dettes et devenir encore plus riche qu’avant de tout perdre. Au passage, cette histoire en forme de story-telling à l’américaine est aujourd’hui remise en cause. Voilà le genre d’histoire qui nous conduit à penser qu’il faut risquer gros pour gagner gros.

Mais l’enrichissement en bourse à la Kerviel ou à la Jordan Belfort n’est pas représentatif de la réalité. La réalité de l’investisseur moyen qui génère des profits avec la bourse est bien différente.

Cet investisseur moyen avisé n’essaye pas d’anticiper le marché, et ne prend que de faibles risques, très calculés. Il mène une vie normale, loin des clichés de la jet-set. Son niveau de vie est raisonné. Il ressemble davantage à un Warren Buffett, dont la stratégie est basée sur un enrichissement progressif sur le long terme. Son style de vie est modeste, voir frugal. Buffett conduit une vieille voiture et habite toujours la même maison achetée en 1958 dans un quartier résidentiel à Omaha, Nebraska. Il est pourtant multimilliardaire.

Mais revenons à notre bon investisseur avisé: comment gagne-t-il sans prendre de risques ? Il sait qu’une bonne diversification de ses actifs ne nuit pas à sa performance, et qu’elle permet de maîtriser ses risques. L’investisseur avisé a construit son portefeuille de manière à se protéger des crises et autres événements qui ruinent les investisseurs en herbe. Il dort sur ses deux oreilles et regarde ses actifs augmenter année après année. Enfin, il observe également ces nouveaux investisseurs qui se pensaient plus malins en ayant fait un All-in de leur patrimoine sur une action ou sur le Bitcoin. Il les voit sombrer dans l’euphorie en marché haussier, pour ensuite tomber en dépression et disparaître du circuit au prochain retournement de marché.

Alors oui, on a peut-être tous connu l’histoire de l’ami d’un ami qui a spéculé et s’est acheter une belle voiture neuve ou une piscine avec ses gains. On connait beaucoup moins ceux qui ont tenté la même chose et y ont perdu toutes leurs économies. Ceux-là ne se vantent pas de leurs exploits.

En réalité, il est inutile de prendre des risques pour gagner de l’argent avec la bourse. Au contraire, il est même dangereux de le faire.

Le portefeuille de notre investisseur avisé pourrait ressembler à celui de Harry Brown, à l’origine du Portefeuille Permanent. Il s’agit d’un portefeuille construit pour bien se comporter quel que soit l’environnement économique. Il se compose à parts égales d’actions, d’obligations à long terme, de liquidités et d’or.

Sur les 20 dernières années, ce portefeuille a réalisé la même performance qu’un placement 100% en actions diversifiées (bien plus risqué) sur le marché américain: +6% par an en moyenne, malgré les deux crises majeures du début du millénaire, en 2001-2002, puis en 2008.

Au cours de cette période qui a connu deux crises économiques, il n’a jamais perdu plus de 13% de son capital, quand un portefeuille d’actions aura chuté de 51%. Le Portefeuille Permanent a donc démontré qu’il était quatre fois moins risqué qu’un portefeuille d’actions, et ce à performance égale.

Portefeuille permanent Harry Brown vs portefeuille 100% actions
Portefeuille Permanent VS Portefeuille 100% actions

Si l’on pense qu’il faut prendre des risques pour gagner gros, on aura tendance à construire une réalité basée sur cette supposition. Et nous allons faire vivre cette réalité en nous comportant de manière à nous y conformer.

Nous ferons donc en sorte de repérer inconsciemment les placements risqués qui « peuvent » rapporter gros. Dans la vie, nous obtenons ce que nous tolérons.

L’investisseur avisé ne tolère pas de prendre des risques: il ne remarque donc même pas les opportunités risquées. Il met son focus sur la sécurité ET sur le rendement : l’investisseur avisé recherche tout ce qui contient ces deux ingrédients, et obtient ce qui correspond à sa propre réalité: de bons rendements et des risques maîtrisés.

Il existe certains actifs qui sont conçus pour délivrer une performance proche du marché tout en offrant une garantie de préservation du capital : par exemple, les produits ou obligations structurées. L’investisseur voit son argent bloqué pendant une durée d’investissement déterminée à l’avance. Une garantie totale ou partielle en capital en cas de crise est offerte en échange d’une moindre performance en cas de marché haussier.

Attention cependant, ce type de produit est plus complexe qu’une simple action ou obligation. Il en existe de différentes sortes, et tous ne se valent pas. Renseignez-vous et ne foncez jamais tête baissée dans un investissement, quel qu’il soit.

Conclusion : Cherchez des investissements peu risqués qui rapportent.

Mythe N°3 sur l’investissement : Il faut être calé en finance pour bien investir

C’est le mythe du « petit malin en investissement », qui, avec la bonne information, arrive à trouver l’action dont le cours est prêt à exploser.

Ce genre de situation relève plus de la chance que d’une compétence avérée en prédiction des marchés. Et comme nous l’avons vu plus haut, les professionnels sont très loin de pouvoir délivrer une performance ou des conseils susceptibles de battre le marché.

La solution ? Investir dans le marché. Les trackers d’indices visent à reproduire la performance des marchés boursiers en détenant les actions des entreprises qui le composent. Si une entreprise venait à faire faillite, elle sortirait de l’indice boursier et serait alors automatiquement remplacée par une autre.

Investir dans un indice offre donc une protection par la diversification, et l’assurance de battre 95% des gérants de fonds. Tout cela sans avoir besoin de connaissances spécifiques, ni de se demander quelle action choisir. D’ailleurs, plusieurs grandes figures de l’investissement recommandent aux particuliers d’investir dans des fonds indiciels, pour leur rendement élevé, leurs faibles coûts et leur simplicité.

Attention, je ne dis pas qu’une stratégie globale doit reposer uniquement sur l’achat d’un tracker en actions reproduisant l’indice du CAC40. Même en possédant un grand nombre d’actions, le risque serait quand même avéré lors des crises économiques pendant lesquelles la majorité des actions chutent en même temps.

Savoir maîtriser son risque constitue le fondement de tout investissement. Les connaissances financières requises pour investir sur des trackers sont proches de zéro. Néanmoins, il reste nécessaire de comprendre l’allocation d’actifs. Savoir évaluer sa propre tolérance au risque est aussi indispensable, mais c’est un autre sujet.

Conclusion : L’investissement en bourse n’est pas seulement réservé aux traders ou aux agrégés en finance des marchés.

Aller plus loin et dépasser les mythes de l’investissement

J’espère que cet article vous aura permis d’y voir plus clair, mais aussi de faire le tri concernant certaines grandes idées reçues.

Ces 3 mythes de l’investissement ont peut-être constitué pour vous des barrières invisibles, des croyances vous empêchant d’agir. Quelles actions souhaiteriez-vous mettre en place maintenant que vous avez fait sauter certaines limites dans votre esprit ?

Partagez votre avis dans les commentaires ! 🙂

2 commentaires sur “Les 3 grands mythes de l’investissement en bourse

  1. Je suis totalement d’accord avec ton article. Particulièrement le fait qu’un investisseur doit s’éloigner du risque. Il doit rechercher les opportunités dans l’incertitude qui peut entourer certains actifs mais prendre le moins de risque possible. C’est la combinaison incertitude++/risque– qui est pour moi la meilleure stratégie. Pour Monish Pabrai, investir de cette manière c’est comme obtenir gratuitement un ticket de loterie : on n’a rien à perdre et tout à gagner. Merci pour ton article !

    1. Merci pour ton retour,

      Souvent on parle de la recherche d’un rendement/risque asymétrique, où le rendement espéré dépasse le risque en terme de probabilité. Et statistiquement, quand on a les probabilités de son côté, on sera toujours gagnant à long terme, même en se trompant et en perdant à court terme.

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